Le constat est à la portée de tout un chacun, la ville regorge d’animaux, sauvages ou domestiques, existant ou coexistant avec les humains. Pour ces populations animales, l’environnement urbain, leur source d’alimentation vitale, est une machine à broyer. La ville est un abattoir impitoyable. Amis ou honnis, désirables ou clandestins, les activités humaines ne font pas de distinction entre ces animaux.
L’existence est vile, ce sont eux cependant qui nettoient la ville. La trace de leurs destinées sera effacée par d’autres silhouettes invisibilisées de la ville, des humains dotés de balais, pelles et machines à brosser le bitume. Le rapprochement fait horreur.
Ces cadavres sont l’objets de cette série de photographies débutée à la fin des années 1980. Les clichés sont imprévisibles et aléatoires, dans le temps et l’espace, enregistrés au grés des déplacements et des visites urbaines, que se soit près de chez moi, sur le trajet de mon travail, en France ou ailleurs en Europe. Le fait que les oiseaux soient, de loin, les cadavres les plus visibles, ils sont de loin les plus représentés. La faible présence d’animaux domestiques est involontaire, il y en a, mais peu ; par la suite se sont des clichés qui ont été évités, trop dérangeant, surtout avec un animal de compagnie chez soi.
Le paradoxe dans ces images, est la façon dont sont rapprochée des vues crues et sans fards, violentes et nauséeuses, avec de véritables mises en scène orchestrées par le micro-paysage urbain des surfaces d’asphalte, du bitume, de trottoirs, de déchets et de dispositifs de toutes sortes. Cette esthétisation n’atténue en rien la férocité générée par ces destins veules.